Le Canada accueille de plus en plus de travailleurs étrangers temporaires. Pas uniquement dans le secteur agricole, mais aussi dans d’autres domaines où les besoins de main-d’œuvre sont criants. Le nombre de travailleurs guatémaltèques embauchés dans des entreprises québécoises a plus que doublé en cinq ans.
À l’aéroport international La Aurora, un vol nolisé décolle pendant la nuit vers Montréal, transportant 128 travailleurs. Des agents de l’agence de recrutement ComuGuate les appellent un à un pour leur remettre une enveloppe contenant tous les documents nécessaires : passeport, visa, contrat de travail, détails sur leur futur employeur, etc.
En 2022, l’organisme de liaison guatémaltèque ComuGuate, qui fait le pont entre les candidats et les entreprises agricoles canadiennes, a accompagné près de 13 000 travailleurs, dont environ 10 000 pour aller au Québec. L’organisation se charge notamment du processus de sélection et des formulaires à remplir, en plus de coordonner le voyage vers le Canada.
Notre but est de prévenir la fraude migratoire. Avant de recruter, c’est très important de dire à la population guatémaltèque qu’il ne faut pas payer pour le travail à l’étranger
, explique la responsable du recrutement pour ComuGuate, Estefania Pineda.
Devant les portes de l’aéroport, des familles entières sont regroupées pour dire au revoir à ceux qui partent.
Les gens s’embrassent, se serrent longuement dans leurs bras, des enfants rient, d’autres pleurent. Parfois, un seul travailleur est accompagné d’une vingtaine de ses proches à l’aéroport.
Le travail est au Canada, mais le cœur reste au Guatemala.
La plupart [des travailleurs] ne veulent pas déménager au Canada. Ils se disent, « j’ai ma famille ici, ou c’est trop compliqué »
, soutient la responsable du recrutement chez ComuGuate, Estefania Pineda.
<
p class= »e-p »>Plusieurs d’entre eux n’ont qu’une vague idée de l’endroit où ils aboutiront et du travail qu’ils devront accomplir. Ce qui compte, c’est qu’ils toucheront un revenu qu’ils auraient du mal à gagner au Guatemala.
Même au salaire minimum de 15,25 $ de l’heure, ils ont bon espoir d’améliorer les conditions de vie de leur famille au Guatemala.
Ça améliore beaucoup [la vie], mais il y a quand même une critique que je fais aux travailleurs. On a des travailleurs qui sont là depuis que le programme a commencé, il y a 20 ans. Après 20 ans à voyager, ils me disent : « Est-ce que je peux recommander mon fils? » […] Vous êtes allés travailler au Canada pendant [toutes ces années], vous voulez donner à vos enfants une meilleure vie. Pourquoi est-ce que vos enfants vont continuer à aller travailler dans l’agriculture quand ils peuvent faire des études, aller à l’université, avoir un meilleur emploi?
demande-t-elle.
Estefania Pineda croit par ailleurs que les travailleurs sous-estiment parfois les difficultés d’une vie à distance. À travers le temps, j’ai vu des expériences très dures. Il y a beaucoup de séparations. Le tissu familial se brise. Des fois, la femme part avec quelqu’un d’autre, elle dit : « Je ne peux pas supporter d’être sans toi”.
« C’est très compliqué au niveau de la relation famille. Mais la plupart des travailleurs me disent : « C’est quelque chose que je dois faire pour soutenir ma famille, je dois souffrir pour avoir l’argent pour les aider. » »