
Alors que les frappes aériennes et les explosions ont continué à secouer toute la journée différents quartiers de Khartoum, l’armée du général Abdel Fattah al-Burhane a annoncé en soirée avoir dépêché des négociateurs en Arabie saoudite, après 21 jours de combats ayant fait 700 morts, 5000 blessés, 335 000 déplacés et 115 000 réfugiés.
Ces émissaires vont se retrouver à Djeddah pour discuter des détails de la trêve
plusieurs fois renouvelée, mais jamais respectée, a-t-elle expliqué, sans que l’autre camp, celui des Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdane Daglo, ne commente dans l’immédiat.
Un retour à des négociations politiques sur l’avenir d’un pays sorti en 2019 de 30 années de dictature militaro-islamiste pour replonger sous la coupe des militaires avec le putsch des deux généraux en 2021 ne sera envisageable qu’après une véritable trêve, a martelé l’émissaire de l’ONU
au Soudan, Volker Perthes.Vaine agitation diplomatique
La communauté internationale peine à agir en rangs organisés. Le Conseil des droits de l’homme de l’ONU
tiendra une session spéciale le 11 mai, soit près d’un mois après le début des hostilités.Dimanche, ce sont les ministres des pays de la Ligue arabe qui doivent examiner le dossier soudanais
sur lequel ils sont profondément divisés, après plusieurs discussions entre dirigeants de l’Union africaine (UA) et de l’Igad, l’organisation régionale de l’Afrique de l’Est.
La médiation américano-saoudienne ne semble pas toujours converger avec les autres efforts régionaux en vue de faire taire les armes.
À Washington, le président Joe Biden a brandi jeudi la menace des sanctions, mais s’est borné à dénoncer les individus qui menacent la paix
, sans nommer personne.
Un conflit prolongé
Pour le renseignement américain, il faut s’attendre à un conflit prolongé
dans le pays de 45 millions d’habitants parce que les deux camps pensent pouvoir l’emporter militairement et ont peu de raisons de venir à la table des négociations
pour discuter de leur avenir politique.
L’ONU
prévient que 860 000 personnes, des Soudanais, mais également de nombreux Sud-Soudanais retournant dans leur pays, pourraient traverser les frontières ces prochains mois et réclame 402 millions d’euros pour aider le pays, l’un des plus pauvres au monde.Plus de 56 000 personnes
sont arrivées en Égypte, selon l’ONU , 30 000 au Tchad
, plus de 12 000
en Éthiopie et 10 000 en Centrafrique.
Au Darfour, dans l’ouest frontalier du Tchad, des civils ont été armés pour participer aux affrontements mêlant militaires, paramilitaires et combattants tribaux ou rebelles, selon l’ONU
.L’ONGNorwegian Refugee Council (NRC), dont les locaux ont été pillés, dénombre au moins 191 morts, des dizaines d’habitations incendiées et des milliers de déplacés
dans cette région ravagée dans les années 2000 par un conflit ayant fait environ 300 000 morts et 2,5 millions de déplacés selon l’ONU .
Des témoins ont aussi rapporté jeudi des combats à El-Obeid, à 300 km au sud de la capitale.
Dans la ville côtière de Port-Soudan, épargnée par les violences, l’ONU
et de plus en plus d’ONG tentent de négocier l’acheminement de ces cargaisons vers Khartoum et le Darfour où hôpitaux et stocks humanitaires ont été pillés et bombardés.La faim menace près de la moitié de la population
Entre 2 et 2,5 millions de personnes supplémentaires pourraient souffrir de malnutrition aiguë au Soudan, portant le total à au moins 19 millions d’ici six mois si le conflit se poursuit, a annoncé un porte-parole de l’ONU
vendredi.Le Programme alimentaire mondial (PAM) prévoit que le nombre de personnes victimes d’insécurité alimentaire aiguë va augmenter entre 2 et 2,5 millions, augmentant le nombre total à 19 millions dans les prochains trois à six mois si le conflit se poursuit
, a déclaré Farhan Haq, porte-parole adjoint du secrétaire général de l’ONU .
Selon le rapport du PAM
, début 2023, 16,8 millions de Soudanais – sur quelque 50 millions d’habitants – souffraient d’insécurité alimentaire grave, déjà un million de plus qu’un an plus tôt.En mai 2023, en prenant en compte le conflit en cours […], nous pouvons prudemment estimer que le nombre de personnes victimes d’insécurité alimentaire grave augmentera au moins à 19 millions (près de 40 % de la population) dans les trois à six mois
.