Séisme : pourquoi le Maroc refuse-t-il l’aide de certains pays?

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Quelques jours après le séisme qui a fait plus de 2800 morts, le gouvernement marocain a accepté l’aide humanitaire de quatre pays (Espagne, Émirats arabes unis, Qatar et Royaume-Uni), mais n’a pas encore accepté celle de la France, du Canada ou des États-Unis. Est-ce une situation qui sort de l’ordinaire, ou est-ce plutôt dans l’ordre des choses?

La réponse : un peu des deux. C’est dans l’air du temps de voir de la résistance de certains pays ne pas dire oui de manière inconditionnelle , affirme d’emblée François Audet, directeur de l’Observatoire canadien sur les crises et l’action humanitaires, en entrevue lundi au 15-18.

Le Maroc veut démontrer cette autonomie légitime de décider ou non de recevoir cette aide-là

M. Audet rappelle d’ailleurs que lors des feux de forêt qui ont eu lieu au Canada cet été, les autorités ont conclu des ententes avec certains pays, au détriment d’autres.

Des sauveteurs tentent de trouver des survivants parmi les décombres.

Des sauveteurs espagnols et marocains fouillent les décombres à la recherche de survivants dans le village de Talat N’Yacoub, dans la province d’al-Haouz, au Maroc frappé par le tremblement de terre, le 11 septembre 2023.

Photo : afp via getty images / FADEL SENNA

En entrevue à l’émission Zone info, Kerlande Mibel, fondatrice et présidente-directrice générale du Forum économique international des Noirs, reconnaît que cette décision de Rabat puisse avoir l’air contre-intuitive, mais précise que ce n’est pas nécessairement une mauvaise idée.

Elle rappelle le tremblement de terre à Haïti en 2010, où les secours humanitaires internationaux avaient immédiatement été dépêchés sur place. [Mais] il n’y avait pas de capacité ni de logistique à coordonner. C’est mieux que le pays décide de cette coordination et comment il veut accueillir cette aide , affirme Mme Mibel.

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Toujours à Zone info, le journaliste marocain Abdellah Tourabi souligne qu’il n’y a eu aucun refus, de la part du Maroc, de recevoir de l’aide internationale. [Le séisme a eu lieu] dans une zone assez difficile d’accès. Ça ne sert à rien d’avoir une armée [d’humanitaires] et qu’ils ne peuvent même pas accéder à ces zones-là.

Avec un bilan provisoire qui s’élève à 2800 morts et 2500 blessés, M. Audet, qui est également professeur titulaire à l’École des Sciences de la Gestion (ESG) de l’Université du Québec à Montréal, évoque une pression croissante des besoins de la population.

La population est en droit de dire : « est-ce qu’on peut se permettre de refuser l’aide internationale dans ce contexte-là? » […] Cette pression va éventuellement peut-être jouer en faveur d’une plus grande ouverture.

Les quatre pays qui ont été sélectionnés par Rabat ont offert des services de secours, comme par exemple des chiens renifleurs, mais il restera à voir les phases subséquentes, comme celles de nettoyage et de reconstruction, souligne M. Audet. La coopération internationale va passer à un autre niveau, dit-il.

Refus de l’aide française, un signe politique clair

Le directeur de l’Observatoire canadien sur les crises et l’action humanitaires est également conscient qu’on peut interpréter le fait que le Maroc n’ait pas accepté l’aide de la France comme un désir de se détacher de son passé colonial.

Paris tente d’ailleurs d’étouffer la polémique naissante sur son aide qui a été refusée par le Maroc.

C’est une mauvaise querelle, une querelle tout à fait déplacée. Le Maroc n’a refusé aucune aide, aucune proposition. […] Le Maroc est souverain.

Le pays est seul en mesure de déterminer quels sont ses besoins et le rythme auquel il souhaite que des réponses soient apportées, a ainsi ajouté la ministre Colonna, sur la chaîne BFMTV.

Portrait.

La ministre française des Affaires étrangères, Catherine Colonna. (Photo d’archives)

Photo : AFP / AMANUEL SILESHI

Dimanche, le président Emmanuel Macron déclarait que la France était prête à intervenir à la seconde où les autorités marocaines le demanderaient.

Toutefois, pour Pierre Vermeren, historien et professeur à l’Université de la Sorbonne, il s’agit pourtant d’un signe politique clair du froid entre les deux pays.

Les Français ont l’habitude de travailler avec le Maroc, a-t-il déclaré à l’AFP, notant la question de la langue.

Les relations entre le Maroc et la France, ancienne puissance coloniale où vit une importante diaspora marocaine, sont tendues depuis qu’Emmanuel Macron s’efforce de se rapprocher de l’Algérie, qui a rompu en 2021 ses relations diplomatiques avec Rabat, accusé d’actes hostiles.

Des restrictions dans l’octroi de visas aux Marocains, levées en décembre dernier, avaient aussi grippé la relation. Depuis des mois, il n’y a plus d’ambassadeur du Maroc en France. Rabat s’impatiente également, car Paris ne semble pas enclin à bouger les lignes sur l’épineux dossier du Sahara occidental, contrôlé à près de 80 % par le Maroc.

Sans nier les tensions bilatérales, Catherine Colonna a, elle, assuré que les relations étaient loin d’être rompues. Elle a fait savoir qu’Emmanuel Macron avait échangé à de nombreuses reprises au cours de l’été avec le roi Mohammed VI et que les deux pays travaillaient à trouver une date sur la visite du président français au Maroc.

Avec les informations de Agence France-Presse

Source :Radio Canada

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