En Ukraine, les dirigeants cachent les morts, mais les cimetières ne mentent pas

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Le nombre de morts en raison de la guerre a considérablement augmenté du côté ukrainien depuis six mois, selon les estimations de hauts responsables américains. Si les dirigeants du pays refusent de donner les statistiques officielles, la réalité sur le terrain témoigne sans contredit des pertes massives et douloureuses que vivent les citoyens et les soldats.

Les chiffres réels demeurent difficiles à connaître, puisque les Russes continuent de sous-estimer leurs pertes et les Ukrainiens ne divulguent pas de statistiques officielles. Malgré tout, de hauts responsables américains, cités par le New York Times, estiment qu’environ 70 000 soldats ukrainiens sont morts depuis le début de la guerre, le 24 février 2022, et 120 000 ont été blessés.

Le chiffre est inquiétant pour une force armée estimée à seulement 500 000 personnes. Mais surtout, il s’agit là d’une augmentation majeure dans les six derniers mois. En avril, soit après un peu plus d’un an de guerre, le Pentagone estimait à 17 500 le nombre de soldats ukrainiens morts au combat.

La bataille de Bakhmout, décrite comme l’enfer sur terre au printemps dernier, y est pour quelque chose. Mais les conséquences de la contre-offensive ukrainienne, lancée au début de l’été, ne sont pas à négliger non plus.

Vue aérienne d'un immeuble en flammes.

La ville de Bakhmout a été ravagée par une longue bataille pour la ville au printemps 2023.

Photo : Reuters / Armée ukrainienne

L’Ukraine a changé de stratégie depuis, mais en juin, les deux premières semaines de la campagne visant à percer les défenses de l’occupation russe ont été coûteuses. Jusqu’à 20 % des armes ukrainiennes amenées sur le champ de bataille ont été détruites ou endommagées, selon des hauts responsables américains et européens. Ces pertes comprennent des machines de combat envoyées par les Occidentaux, comme des chars et des véhicules blindés de transport de troupes.

Mais surtout, des milliers de soldats sont morts, essentiellement des jeunes, encore peu entraînés. Ils mouraient par dizaines, avait alors affirmé un haut gradé ukrainien à un journaliste de la BBC sur le terrain.

La difficile identification des soldats tombés au combat

Margo, une Ukrainienne de 26 ans, en sait quelque chose. C’est son travail d’enregistrer les informations sur les soldats morts dans la région de Donetsk, où est situé son bureau, non loin du front.

Le plus dur, c’est quand on voit un jeune homme qui semble avoir à peine 20 ans parmi les morts, a-t-elle confié à la BBC. On ne peut pas s’y habituer.

Parmi eux, son époux Andrii, 23 ans, tué sur le champ de bataille en décembre 2022. Il est mort en défendant son pays.

Malgré tout, Margo ne pleure jamais en public. Le métier l’a rendue dure comme l’acier, assure-t-elle. Je garde tout à l’intérieur, jusqu’à ce que je rentre le soir à la maison.

À la morgue, du moins à l’une des nombreuses morgues se situant près du front, le travail le plus complexe est de mettre un nom sur les soldats non identifiés, amenés un à un directement du champ de bataille dans des sacs mortuaires.

Pour y arriver, les employés ouvrent leurs poches, encore pleines d’artefacts de leur vie quotidienne. Des clés, un téléphone, des photos de famille : autant d’indices les aidant à les identifier.

Mais quelques soldats arrivent aussi à la morgue en pleine forme physique. Ils viennent, cigarette à la bouche, aider à identifier les morts et vérifier s’ils faisaient partie de leur bataillon. C’est difficile, mais c’est nécessaire. Cela fait partie de notre travail. Nous devons leur permettre de partir en paix, dit l’un d’entre eux au journaliste de la BBC.

Les restrictions imposées à la presse sur le terrain interdisent au journaliste de dévoiler le nombre de sacs mortuaires qu’il a vu arriver lors de son passage à la morgue. La ministre ukrainienne de la Défense, Hanna Maliar, a d’ailleurs récemment déclaré que les personnes dévoilant le nombre de victimes s’exposaient à des poursuites pénales.

Pourquoi ces données sont-elles secrètes? Parce que l’ennemi peut utiliser le nombre de morts et de blessés pour calculer nos prochaines stratégies.

Les cimetières ne mentent pas

C’est dans les cimetières ukrainiens que l’ampleur réelle du nombre de victimes de la guerre est mise à nu.

Au cimetière de Krasnopilske, près de Dnipro, les tombes fraîchement creusées décorées d’un drapeau ukrainien prennent de plus en plus de place. Elles s’approchent dangereusement des limites du terrain, certainement bientôt plein. Sur l’une d’entre elles, Oksana, 31 ans, pleure seule. Son défunt mari, Pavlo, un ancien champion d’haltérophilie et entraîneur personnel, a été tué par un missile russe tombé sur son convoi.

Il s’est enrôlé de son plein gré pour défendre notre pays. C’était un guerrier dans l’âme, épris de liberté. Il était l’incarnation de l’esprit ukrainien.

Il fait partie des soldats qui ont été difficiles à identifier après sa mort. Son corps, tout comme celui des autres soldats dans son convoi, était trop brûlé.

Le nombre de civils tués durant la guerre s’élève quant à lui à 9177, selon les plus récentes données de l’ONU.

Du côté russe, les hauts responsables américains cités par le New York Times ont estimé le nombre de morts à 120 000 et le nombre de blessés entre 170 000 et 180 000. C’est beaucoup, mais les forces russes sont beaucoup plus nombreuses, de même que la population pouvant reconstituer leurs rangs. Des analystes estiment qu’il y a trois soldats russes pour chaque soldat ukrainien.

Qu’à cela ne tienne, ces statistiques ne semblent pas décourager les Ukrainiens. Au contraire, les pertes ont galvanisé la volonté et la détermination pour la victoire.

Oksana avait d’ailleurs fait une promesse à Pavlo : s’il mourait, elle rejoindrait à son l’armée ukrainienne. Depuis maintenant deux mois, elle met sa propre vie en danger et fait partie d’une unité de surveillance aérienne par drones dans la banlieue de Bakhmout.

Le journaliste de la BBC l’a suivie une semaine après leur rencontre au cimetière. Désormais vêtue d’un uniforme militaire, elle se dirige vers une position avancée du champ de bataille à la recherche d’une unité russe ciblant les forces ukrainiennes où le bruit des tirs est assourdissant.

Je dois continuer ce que Pavlo a commencé, pour que ses efforts ne soient pas vains. Je veux participer à notre victoire.

Avec les informations de BBC, New York Times et Le Monde

Source :Radio Canada

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