Des rondelles de hockey de plus en plus intelligentes

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C’était la toute première fois que RDS (un diffuseur francophone) utilisait la technologie développée conjointement par la Ligue nationale de hockey (LNH) et l’entreprise américaine SportsMEDIA Technology (SMT).

C’était un test pour valider son fonctionnement et ses applications. Cette technologie est disponible dans tous les arénas de la LNH. Elle est beaucoup plus utilisée par les diffuseurs américains, mentionne en entrevue téléphonique un représentant de Bell Média, propriétaire de RDS.

Depuis 2019, la LNH tente d’implanter un système qui permet de suivre les déplacements de la rondelle et des joueurs, le Puck and Player Tracking (PPT). Cette technologie permet non seulement de suivre les passes et les lancers à la télévision, mais surtout de collecter de précieuses données au sujet des mouvements des joueurs et de la rondelle sur la patinoire.

Un système électronique embarqué

Au cœur des rondelles utilisées durant la saison 2022-2023 de la LNH se trouve un système électronique capable d’alimenter six diodes électroluminescentes (DEL) qui émettent de la lumière infrarouge. Un peu comme un biscuit, le système embarqué est inséré entre deux épaisseurs de caoutchouc.

La lumière infrarouge est invisible à l’œil nu. C’est pourquoi les spectateurs qui assistent à la partie ne voient pas la traînée lumineuse de la rondelle sur la patinoire, explique Stéphane Kéna-Cohen, professeur de génie physique de Polytechnique Montréal et spécialiste en photonique hybride et moléculaire.

Mais des dizaines de caméras infrarouges placées au-dessus de la patinoire captent la lumière émise par les rondelles, ce qui permet de suivre ses déplacements à la télévision. La longueur d’onde de la lumière infrarouge est différente de celle des autres sources lumineuses dans l’aréna. C’est pourquoi la caméra peut suivre son déplacement, précise le professeur Kéna-Cohen.

La technologie développée par SMT est protégée par deux brevets. Si les DEL existent depuis le début des années 1960 et qu’elles sont aujourd’hui courantes dans nos appareils électroniques, c’est l’une des premières fois qu’elles sont utilisées pour suivre les déplacements d’un objet en mouvement, ajoute le professeur Kéna-Cohen.

Collecter des données

La rondelle filante est l’une des deux technologies comprises dans le PPT. L’autre consiste en une puce insérée dans l’équipement de protection des joueurs qui permet de collecter des données au sujet de leurs déplacements sur la patinoire.

Les données du PPT peuvent servir à plusieurs choses. Les équipes peuvent notamment les utiliser pour étudier les stratégies offensives des autres équipes en analysant la position des joueurs. De leur côté, les diffuseurs peuvent générer des statistiques durant la partie sur le temps de possession et la vitesse des tirs. Ces données sont également précieuses pour les équipes de recherche.

On peut savoir quel joueur est en possession de la rondelle à tout moment durant la partie, et ainsi mesurer l’effort physique qu’il doit déployer pour réaliser des lancers, des passes et se détacher d’un adversaire, illustre Jean Lemoyne, professeur en sciences de l’activité physique et fondateur du Laboratoire de recherche sur le hockey de l’Université du Québec à Trois-Rivières.

Dans ses travaux, le professeur Lemoyne s’intéresse notamment aux effets de la fatigue sur la performance des joueurs durant une partie.

Est-ce que la force ou la précision des lancers diminue durant la partie? Est-ce que le joueur perd davantage de batailles pour la possession de la rondelle? Est-ce que la distance entre les joueurs augmente durant la partie? Ce sont toutes des questions auxquelles la technologie que l’on retrouve dans la rondelle va permettre de répondre, s’enthousiasme le professeur Lemoyne.

Rondelle affichant la logo de la LNH et des Islanders de New York.

Cette rondelle possède six petits cercles qui émettent de l’infrarouge.

Photo : Getty Images / Bruce Bennett

Une simple rondelle, à quelques détails près

Deux entreprises québécoises sont impliquées dans le processus de production des rondelles utilisées dans la LNH.

Depuis le début des années 1990, l’entreprise Soucy Baron, située à Saint-Jérôme, produit le caoutchouc des rondelles. De son côté, l’entreprise sherbrookoise InGlasCo imprime les logos des équipes et de la LNH sur les rondelles.

Il faut un œil aguerri pour distinguer les rondelles filantes des rondelles traditionnelles. À la surface de la rondelle, de chaque côté, il y a six petits ronds. C’est de là qu’est émise la lumière infrarouge, explique Anthony Fisher, président d’InGlasCo, qui doit s’assurer d’éviter d’imprimer les logos par-dessus.

En observant de plus près, on remarque également la présence d’un numéro de série sur le côté de la rondelle. Avant qu’elle ne touche la surface glacée, le personnel de la LNH note le numéro, puis active le système embarqué. La lumière infrarouge émise par la rondelle peut alors être détectée par les caméras.

À l’exception des 12 ronds et du numéro de série, les dimensions des rondelles demeurent identiques : 7,62 centimètres de diamètre et 2,54 centimètres d’épaisseur pour un poids total de 170 grammes.

Plusieurs prototypes de rondelles

Ces rondelles filantes sont l’aboutissement de décennies d’essais et d’erreurs. En 1996, la chaîne de télévision Fox News utilise une rondelle qui s’illumine lorsqu’elle est en mouvement sur la patinoire. L’idée était alors de permettre aux amateurs moins aguerris de suivre plus facilement le déroulement de l’action.

En raison de la pauvre performance de la rondelle, le projet a été cloué au banc pendant plusieurs années. Il faudra attendre la Coupe du monde de hockey 2016 avant de voir surgir un nouveau prototype de rondelle filante. Cette fois, la technologie a pour objectifs non seulement de faciliter le suivi de la rondelle à la télévision, mais aussi de collecter des données.

Dans les années qui suivent, la LNH teste différents prototypes auprès de différents fournisseurs. En 2019, elle a délaissé le système d’identification par radio-fréquence proposé par l’entreprise JogMo au profit de la technologie infrarouge proposée par SMT.

Si les rondelles filantes sont utilisées dès le début de la saison 2020-2021, elles sont rapidement retirées, car leur performance laisse à désirer. La raison : le procédé de finition n’était pas conforme, selon des explications fournies par le président de SMT, Gerard J. Hall dans une entrevue accordée au Sports Business Journal (Nouvelle fenêtre).

Le prototype utilisé depuis le début de la saison 2022-2023 comporte quelques améliorations. Outre le procédé de finition qui a été revu, la distance entre les DEL et la surface de la rondelle a été réduite afin de faciliter sa détection par les caméras.

Un tableau avec des données sur un écran de télévision.

L’outil permet de compiler des statistiques des joueurs.

Photo : AP/NBC

Moneyball s’invite au hockey

Le hockey est un peu en retard sur le plan des statistiques avancées en comparaison avec le baseball ou encore le soccer, souligne le professeur Jean Lemoyne.

« Les sports qui se déroulent à l’extérieur peuvent s’appuyer depuis plusieurs années sur des technologies GPS, ce qui n’est pas le cas du hockey, qui devait développer une solution de rechange, comme les caméras. »

— Une citation de  Jean Lemoyne, professeur en sciences de l’activité physique et fondateur du Laboratoire de recherche sur le hockey de l’Université du Québec à Trois-Rivières

<

p class= »e-p »>En 2011, le film américain Moneyball racontait comment l’utilisation des statistiques avancées avait influencé la gestion des équipes de la Ligue majeure de baseball (MLB).

Dans les dernières années, des équipes ont étudié l’endroit où frappent le plus souvent certains joueurs, afin d’ajuster la position de leurs joueurs en défensive. Une façon de faire que la MLB tente de limiter cette saison en imposant de nouvelles règles sur la position des joueurs en défense (Nouvelle fenêtre).

Actuellement, les statistiques avancées s’immiscent un peu partout dans l’univers du hockey, de l’évaluation des joueurs prometteurs jusqu’aux négociations de nouveaux contrats, en passant par le téléviseur des amateurs.

Leur utilisation suscite des réactions mitigées. Sur les médias sociaux, plusieurs amateurs québécois ont exprimé leur réticence au sujet de l’utilisation de la technologie de suivi par RDS. Questionné à savoir si la technologie sera utilisée de nouveau, le représentant de RDS mentionne qu’aucune décision n’a été prise pour le moment.

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Source :Radio Canada

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