Analyse | Ukraine : vrai ou faux départ de la « grande contre-offensive »?

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Cette fameuse grande contre-offensive ukrainienne est-ce vraiment ce que l’on voit aujourd’hui? Une chose est sûre : ça bouge réellement sur certains fronts, ce qui n’est pas entièrement nouveau dans le Donbass, mais ça l’est dans la province de Zaporijjia.

Dans tous ces cas, les forces ukrainiennes sont du côté de l’attaque. Les signaux sont là. Des images circulent sur Internet, montrant des chars allemands Leopard et des blindés américains Bradley en action dans la région de Zaporijjia. Les armes et véhicules promis et livrés depuis le début de l’année sont donc bel et bien là.

Plusieurs sources convergent vers ce diagnostic, mais de façon notable, les officiels de Kiev ne figurent pas parmi ceux qui parlent ouvertement de contre-attaque.

Le New York Times a cité des sources officielles américaines qui le disent. Les Russes eux-mêmes le répètent depuis le 5 juin, y compris le ministre de la Défense Sergueï Choïgou, même si c’est pour prétendre – peut-être faussement – que les attaques ukrainiennes échouent.

Le chef et financier du groupe Wagner, Evgueni Prigojine, vient de l’écrire sur ses réseaux sociaux : ils attaquent, ils sont bien armés! Et puis le Washington Post citait le 8 juin des sources anonymes ukrainiennes qui confirmeraient l’attaque.

Ça commence à faire beaucoup de gens qui disent à peu près la même chose.

Opérations diverses et étendues géographiquement

Mais de quoi s’agit-il au juste? De la grande contre-offensive ou encore de simples coups de sonde, pour tester les forces et les faiblesses de l’ennemi?

Ce qu’on peut noter, c’est que les opérations sont diverses et étendues géographiquement. On parle actuellement et simultanément, de deux grands secteurs d’opérations : le Donbass, avec les environs de la ville de Bakhmout, où ça se déroule déjà depuis la fin mai. Et puis plus récemment, depuis le 6 ou 7 juin, de la province de Zaporijjia, avec apparemment plusieurs détachements distincts de forces ukrainiennes, sur cinq ou six lignes d’attaque.

Images d'un barrage percé et submergé par les eaux.

Les Ukrainiens accusent les forces russes qui occupent la zone d’avoir fait exploser volontairement le barrage dans le but de ralentir la contre-offensive prochaine de Kiev. Moscou accuse quant à lui les forces ukrainiennes d’avoir bombardé ou saboté l’installation.

Photo : AP

Il semble que le troisième grand front qui était évoqué et que redoutaient certains Russes dans la province de Kherson, à travers le fleuve Dniepr, soit écarté pour le moment.

Une thèse, défendue le 8 juin par l’Union européenne, dit quel’attentat du 6 juin qui a détruit le barrage de Nova Kakhova a été perpétré par la partie russe, justement pour rendre ce chemin impraticable par les troupes ukrainiennes.

Tout juste après avoir été envahis par les eaux du fameux barrage explosé, les citoyens de Kherson, la ville, ont été bombardés par les forces russes. Mais ce drame épouvantable, cet épisode qui est à la fois une crise humanitaire, un drame écologique et un crime de guerre, est bien distinct de la guerre terrestre qui se déroule sur d’autres fronts.

Ces fronts multiples peuvent-ils, tous ensemble, constituer la grande contre-attaque annoncée et attendue?

Pas un débarquement de Normandie

L’offensive ukrainienne n’est manifestement pas l’équivalent d’un débarquement de Normandie avec un Jour J, une grande attaque à l’aube, concentrée dans un secteur, offensive coordonnée et unique.

Elle rassemblerait plutôt une succession d’actions décentralisées, qui s’élargissent et s’étendent, ou se précisent au gré des résultats et des opportunités. Parce que les Ukrainiens, depuis 15 mois, ont su montrer qu’ils étaient opportunistes, qu’ils savaient saisir les occasions et improviser de façon efficace.

Ce caractère hybride ou décentralisé des actions ukrainiennes permet justement aux autorités de Kiev – au-delà de quelques officiels qui apparemment ont chuchoté anonymement à des journalistes du Washington Post – de rester muettes et de nier qu’il s’agisse d’un quelconque Jour J.

Peut-être que le concept de Jour J ne s’applique pas à la stratégie ukrainienne. Peut-être aussi qu’on en est toujours à tester, en différents points, les défenses russes avant de doubler ou tripler la mise sur un secteur, qui sait, à la fin juin ou en juillet.

Des percées réelles, mais limitées

Après 48 heures d’opérations, les percées ukrainiennes sont réelles, mais limitées. Selon le renseignement militaire britannique, les Ukrainiens ont l’initiative, tout en ayant subi des pertes. Le camp russe prétend que plusieurs chars Leopard 2 auraient déjà été détruits – le chiffre de huit a été avancé. Les preuves visuelles circulant sur les réseaux sociaux ne sont toutefois pas convaincantes.

Chars d'assaut Léopard.

Chars d’assaut Léopard livrés par le Canada à l’Ukraine.

Photo : Radio-Canada / Jean Brousseau

Sur Twitter, le militaire à la retraite et historien militaire Michel Goya, auteur de l’excellent blogue La voie de l’épée, écrivait le 8 juin que sur les zones attaquées – cinq lignes d’attaque dans la province de Zaporijjia, plus les environs de Bakhmout – la progression des Ukrainiens, en 48 heures, serait de l’ordre de 100 mètres à l’heure, ce qui selon lui n’est pas mal.

Le même analyste écrit aussi que les défenses ennemies dans les territoires occupés sont profondes et multiples. Dans la plaine de Zaporijjia, les Russes ont multiplié les défenses, les fameux alignements de dents de dragon, les douves, bunkers, tranchées, et ce sur plusieurs épaisseurs successives, parfois cinq ou six séries de défenses artificielles, réparties sur 10 ou 20 km de profondeur.

Bien entendu, ce n’est pas comme ça sur la totalité des 1000 km de front. Dans ces conditions, le travail des Ukrainiens consistera à trouver les trous dans cette cuirasse, puis à les exploiter. Ce ne sera pas facile.

Notre dossier Guerre en Ukraine

Source :Radio Canada

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